Le Grand Echiquier by Zbigniew Brzezinski

Le Grand Echiquier by Zbigniew Brzezinski

Auteur:Zbigniew Brzezinski [Brzezinski, Zbigniew]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Un seul choix possible, deux préalables.

Le choix européen est la seule perspective géostratégique réaliste qui permettra à la Russie de retrouver un rôle international et les ressources nécessaires pour engager sa modernisation. Par Europe, nous entendons l’ensemble géopolitique uni par le lien transatlantique et engagé dans l’élargissement de l’Union européenne et de l’OTAN, tel qu’il prend tournure, comme nous l’avons vu au chapitre 3. Telle est l’alliance qui profitera à la Russie et lui évitera de s’enfoncer dans un isolement géopolitique néfaste.

Du point de vue américain, la Russie paraît vouée à devenir un problème : si sa faiblesse exclut de la considérer comme un partenaire, les forces qu’elle conserve ne nécessitent pas l’application de soins d’urgence. Pourtant, les Américains peuvent peser sur le contexte actuel, en définissant un nouveau cadre qui convaincrait les Russes que leurs intérêts dépendent de leurs relations avec l’Europe atlantiste. Même si une alliance stratégique solide de la Russie avec la Chine ou avec l’Iran a peu de chances de se concrétiser, l’Amérique doit éviter de détourner Moscou de son meilleur choix géopolitique. Autant que possible, les États-Unis doivent tenir compte, dans leurs relations avec la Chine ou l’Iran, de l’impact possible sur les calculs géopolitiques russes. En revanche, refuser d’affronter les illusions de Moscou sur ses choix géostratégiques planétaires ne servira qu’à reculer les décisions historiques nécessaires pour rompre avec le profond malaise du pays.

L’expansion économique et géopolitique européenne s’accompagne de la mise en place d’un immense réseau d’échanges qui facilite le développement du commerce, des communications, des mouvements de capitaux et de l’éducation. La Russie doit accepter cette réalité nouvelle dont elle peut tirer parti. La participation au Conseil de l’Europe est un premier pas, il préfigure d’autres liens constructifs. En s’engageant dans cette direction, la Russie n’aura, à terme, pas d’autre choix que celui d’imiter le cours suivi par la Turquie kémaliste, qui, rompant avec les ambitions impériales de la période ottomane, s’est engagée sur la voie de la modernisation, de l’européanisation et de la démocratisation.

Ce que l’Europe, moderne, riche et démocratique, alliée à l’Amérique peut apporter à la Russie, aucune autre voie ne peut le lui offrir. Ni l’Europe ni l’Amérique ne constituent une menace pour la Russie, tant qu’elle développe un État national et démocratique, sans visées expansionnistes. Toutes deux respectent son intégrité territoriale, alors que la Chine pourrait un jour exprimer ses convoitises. Aucune des deux ne partage avec elle de frontière sensible, alors que les nations musulmanes bordent son flanc sud, dans des régions aux limites ethniques et territoriales non clarifiées. Pour l’Europe comme pour l’Amérique, une Russie démocratique et nationale représente un élément de stabilité hautement souhaitable dans l’ensemble eurasien explosif.

Pour que le choix de l’Europe ― et en conséquence de l’Amérique ― se révèle fructueux, la Russie doit satisfaire à deux exigences : tout d’abord, rompre sans ambiguïté avec son passé impérial ; ensuite, cesser ses tergiversations à propos de l’élargissement des liens politiques et militaires entre l’Europe et l’Amérique. Trancher la première question exige d’accepter le pluralisme géopolitique qui prévaut aujourd’hui sur le territoire de l’ex-Union soviétique.



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